Recension : Première édition du Commentaire romand de la Loi fédérale sur la protection des données
Lettres orange sur fond bordeaux.
Ces quelques mots aux accents de cocktail à la mode évoquent chez les juristes romand·e·s le sentiment agréable – mais peu fréquent chez les hommes et femmes de loi dont l’esprit a été peu à peu façonné pour douter de tout et tout le temps – d’avoir un ami sur qui l’on peut compter. Depuis de nombreuses années, la collection des Commentaires romands contribue directement à l’équilibre psychologique des praticiens et praticiennes en leur procurant en outil solide, efficace et fiable, synonyme de gain de temps substantiel. Il manquait néanmoins une pierre importante à ce bel édifice de connaissances : un volume dédié à la Loi fédérale sur la protection des données (LPD), une loi dont la version initiale est entrée en vigueur il y a plus de trente ans. Si l’on est philosophe, on fera sienne la sagesse de Leonard Cohen, qui chantait de manière solaire qu’il y a une fissure dans toute chose et que c’est par celle-ci que pénètre la lumière (« There is a crack in everything, that’s how the light gets in »). Néanmoins, dans le cas de la LPD, l’absence de Commentaire romand s’apparentait davantage à un puits lugubre plongeant dans l’abîme qu’à une fissure photo-salutaire.
Il fallait donc y remédier, et remédiation fut apportée à l’occasion de l’entrée en vigueur de la révision complète de la LPD le 1er septembre. Sous la direction chevronnée des Professeurs Philippe Meier et Sylvain Métille, vingt et un experts et expertes de renom ont uni leurs efforts pour édifier cette première édition du Commentaire romand sur la LPD. Fidèle à l’esprit de la collection, le résultat se situe à la croisée des mondes pratique et théorique. Les commentaires d’articles adoptent une approche efficace et font preuve d’une « riche concision », qui facilite l’accès à un grand nombre d’informations. Chaque entrée fait l’objet d’une introduction qui reflète brièvement l’historique de la norme analysée tout en apportant des éclairages de droit comparé, en particulier à l’aune du RGPD. À n’en pas douter, ces informations se révéleront particulièrement utiles, que ce soit pour interpréter les nouvelles normes de la LPD, certaines d’entre elles étant directement inspirées du RGPD, ou pour mieux évaluer les interactions entre la LPD et les droits étrangers à une époque où les flux de données transfrontières sont devenus si fréquents.
Le Commentaire est certes « romand », mais il est « fédéral » dans son essence. Là où la doctrine alémanique peine souvent – mais pas toujours – à s’appuyer sur une doctrine latine pourtant dynamique dans le domaine de la protection des données, les notes de bas de pages du Commentaire romand de la LPD affichent une belle diversité linguistique. Preuve en est la première référence bibliographique du commentaire de l’article 1 qui cite une contribution doctrinale en langue italienne. Ce constat est moins anecdotique qu’il n’y paraît puisque la qualité d’un ouvrage dépend aussi de la prise en compte des réflexions les plus récentes, peu importe la langue dans laquelle elles ont été développées.
Malgré un prix relativement élevé (prix de l’éditeur : CHF 378.-), les 1119 pages de cette première édition du Commentaire romand de la LPD reflètent le fruit d’un travail important et font de ce projet éditorial un pari réussi.
Proposition de citation : Frédéric Erard, Recension : Première édition du Commentaire romand de la Loi fédérale sur la protection des données, 14 septembre 2023 in www.swissprivacy.law/252
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