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Transparence de la documentation relative à une substance active

Kastriot Lubishtani, le 29 octobre 2021
Le fait qu’un produit phyto­sa­ni­taire fasse l’objet d’une procé­dure d’homologation pendante ne consti­tue pas un motif pour restreindre l’accès aux rapports d’essais et d’études dépo­sés à l’appui de l’approbation d’une substance active qu’il contient (en l’espèce : sulfoxa­flor) si cette dernière a fait l’objet d’une procé­dure indé­pen­dante et donc d’une déci­sion de l’autorité qui l’a conduite à l’inscrire dans l’Annexe 1 de l’Ordonnance sur les produits phyto­sa­ni­taires.

Recommandation PFPDT du 16 juin 2021. Association droit dans le sol c. Office fédé­ral de l’agriculture (OFAG)*

I. En fait

En décembre 2020, l’Association Droit dans le sol requiert de l’Office fédé­ral de l’agriculture (OFAG) l’accès à des docu­ments offi­ciels rela­tifs à deux substances actives, soit le sulfoxa­flor et le thia­clo­prid, figu­rant à l’Annexe 1 de l’Ordonnance sur les produits phyto­sa­ni­taires (OPPh), au produit phyto­sa­ni­taire alanto, ainsi qu’au(x) rapport(s) d’évaluation de l’OFAG et autres auto­ri­tés fédé­rales impli­quées dans le proces­sus d’homologation dudit produit et des substances préci­tées. Plutôt que d’invoquer l’art. 6 LTrans, la requé­rante fonde sa demande sur l’art. 4 de la Convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la parti­ci­pa­tion du public au proces­sus déci­sion­nel et l’accès à la justice en matière d’environnement.

Après plusieurs échanges entre parties, il appa­raît que les docu­ments ne se rappor­tant pas au sulfoxa­flor sont confi­den­tiels en vertu de l’art. 52 OPPh. De ce fait, les entre­prises concer­nées par lesdits docu­ments doivent être consul­tées en vertu du droit d’être entendu consa­cré par l’art. 11 LTrans avant que l’autorité ne puisse se pronon­cer sur la demande d’accès. La demande d’accès est donc divi­sée et porte singu­liè­re­ment dans ce contexte sur les docu­ments offi­ciels rela­tifs au sulfoxaflor.

L’OFAG refuse l’accès aux docu­ments offi­ciels concer­nant le sulfoxa­flor sur la base des art. 3 al. 1 let. b cum 8 al. 2 LTrans en invo­quant le fait que l’inscription de cette substance active dans l’OPPh n’est qu’une « déci­sion inter­mé­diaire » par rapport à la « déci­sion finale » qui auto­ri­sera la mise sur le marché du futur produit phyto­sa­ni­taire (procé­dure en deux temps). Les docu­ments requis feraient partie de la procé­dure concer­nant l’autorisation de mise sur le marché et les rendre acces­sibles pour­rait entra­ver le proces­sus de la libre forma­tion de l’opinion et de la volonté de l’autorité d’homologation (art. 7 al. 1 let. a LTrans).

Contestant l’interprétation de l’OFAG, la requé­rante agit par la voie de la média­tion (art. 13 LTrans) devant le PFPDT qui rend la recom­man­da­tion commen­tée le 16 juin 2021.

II. En droit

En dépit du fait que la requé­rante fonde sa demande d’accès sur la Convention d’Aarhus, le PFPDT souligne que la LTrans garan­tit un droit d’accès étendu englo­bant égale­ment l’accès aux infor­ma­tions sur l’environnement. Il rappelle que le Tribunal admi­nis­tra­tif fédé­ral a déjà jugé que le droit suisse est conforme au droit conven­tion­nel à cet égard (arrêt TAF A‑6755/​2016 du 23 janvier 2017, consid. 3.1.4).

Le PFPDT examine ensuite les trois moyens soule­vés par l’OFAG pour refu­ser l’accès.

Tout d’abord, alors que l’art. 3 al. 1 let. b LTrans s’applique à l’accès au dossier par les parties à la procé­dure au sens de l’art. 6 PA, l’accès par un tiers est régle­menté par l’art. 8 al. 2 LTrans. Ces dispo­si­tions ont pour effet que la LTrans ne permet en prin­cipe pas l’accès à un docu­ment tant qu’une procé­dure est en cours. Le PFPDT souligne cepen­dant que presque tout docu­ment consti­tue la base d’une déci­sion, si bien que le risque que l’art. 8 al. 2 LTrans soit inter­prété de manière trop large ne peut être écarté. C’est pour­quoi trois condi­tions doivent être données pour que cette dispo­si­tion s’applique : (i) il doit exis­ter un lien direct et étroit entre le docu­ment requis et la déci­sion à prendre concrè­te­ment ; (ii) le docu­ment doit maté­riel­le­ment avoir « une impor­tance non négli­geable » pour la déci­sion ; et (iii) il doit exis­ter une certaine connexité tempo­relle entre la déci­sion à prendre par l’autorité et la demande d’accès.

Un produit phyto­sa­ni­taire peut être mis en circu­la­tion en Suisse s’il est homo­lo­gué par l’OFAG. Tel ne peut être le cas en vertu de l’art. 17 OPPh que si les substances actives qu’il contient sont approu­vées. Lorsqu’il contient une substance active ne figu­rant pas encore à l’Annexe 1 OPPh, celle-ci doit être approu­vée dans le cadre d’une procé­dure d’approbation spéci­fique régie par l’art. 4 OPPh. La demande du produc­teur adres­sée à l’OFAG en tant que service d’homologation contient un dossier réca­pi­tu­la­tif avec les rapports d’essais et d’études (art. 6 et 7 OPPh).

En l’espèce, il appa­raît qu’un lien étroit et direct existe entre la première procé­dure d’approbation de la substance active menant à son inscrip­tion dans l’Annexe 1 OPPh et la procé­dure de mise en circu­la­tion d’un produit phyto­sa­ni­taire, la première dépen­dant de la seconde. Ce lien n’existe toute­fois que pour la première procé­dure condui­sant à l’inscription de la substance active dans l’OPPh. Or le sulfoxa­flor y figure depuis le 1er juillet 2018. Faute pour l’OFAG d’avoir démon­tré que son inscrip­tion a un rapport étroit et direct avec la procé­dure pendante, il appa­raît qu’une procé­dure d’approbation ayant conduit à l’inscription du sulfoxa­flor a déjà eu lieu. Qui plus est, l’inscription de cette substance dans l’OPPh a néces­sai­re­ment dû faire l’objet d’une déci­sion comme le révèle l’analyse systé­ma­tique de l’Annexe 2 OPPh. Partant, l’art. 8 al. 2 LTrans est inapplicable.

Deuxièmement, le PFPDT examine l’exception soule­vée de l’art. 7 al. 1 let. a LTrans. Au début de sa recom­man­da­tion, il a rappelé que l’art. 6 al. 1 LTrans insti­tue une présomp­tion d’accessibilité à tout docu­ment offi­ciel ou de trans­pa­rence qui peut être renver­sée par l’autorité qui doit prou­ver l’existence d’une excep­tion (art. 7 LTrans), d’un cas parti­cu­lier (art. 8) ou la protec­tion des données person­nelles (art. 9). Dans la mesure où l’OFAG s’est limi­tée à allé­guer un risque d’altération notable du proces­sus déci­sion­nel concer­nant l’homologation du produit phyto­sa­ni­taire conte­nant le sulfoxa­flor sans toute­fois le démon­trer, elle n’a pas prouvé ce risque, si bien que l’administration supporte le fardeau de la preuve. L’exception est en consé­quence écartée.

Enfin, l’OFAG a égale­ment mentionné la protec­tion (art. 46 OPPh) et la confi­den­tia­lité des rapports d’essais et d’études (art. 52 OPPh) qui sont concer­nés par la demande d’accès. Le PFPDT souligne cepen­dant que la protec­tion doit être « récla­mée » et la confi­den­tia­lité « deman­dée » pour la seconde (al. 7, respec­ti­ve­ment al. 1). L’administration n’a toute­fois pas prouvé que les docu­ments objet de la demande d’accès sont proté­gés ou confi­den­tiels en ne remet­tant aucun docu­ment au PFPDT attes­tant de récla­ma­tion ou de demande en ce sens. Ce moyen est en consé­quence rejeté.

En conclu­sion, le PFPDT recom­mande à l’OFAG d’accorder à la requé­rante l’accès aux docu­ments offi­ciels concer­nant le sulfoxa­flor sous réserve des excep­tions prévues aux art. 7–9 LTrans « qui n’ont pas déjà été exclues » et en tenant compte du prin­cipe de proportionnalité.

III. Commentaire

La présente recom­man­da­tion du PFPDT est logique et doit être approu­vée. Elle a été accep­tée par l’OFAG qui a remis les docu­ments concer­nés à la requérante.

Sur le fond, l’argumentaire de l’administration paraît problé­ma­tique dans la mesure où chaque fois qu’un produit phyto­sa­ni­taire était évalué ou rééva­lué, l’accès à tous les docu­ments offi­ciels qui y sont liés serait voué à l’échec. Cela aurait pour effet de faire barrage à l’accès à des docu­ments offi­ciels concer­nant des substances actives conte­nues dans le produit phyto­sa­ni­taire qui ont d’ores et déjà fait l’objet d’une appro­ba­tion par une déci­sion indé­pen­dante de celle du produit. C’est donc à juste titre qu’un lien direct et étroit entre l’approbation du sulfoxa­flor et l’homologation du produit phyto­sa­ni­taire indé­ter­miné qui le contient a été niée dans le cas d’espèce.

* Une personne de l’équipe swiss​pri​vacy​.law appar­tient à l’Association droit dans le sol. Il ne s’agit pas de l’auteur.



Proposition de citation : Kastriot Lubishtani, Transparence de la documentation relative à une substance active, 29 octobre 2021 in www.swissprivacy.law/98


Les articles de swissprivacy.law sont publiés sous licence creative commons CC BY 4.0.
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