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L’accès à la prise de position interne du SEM relative à une décision du Comité contre la torture

Kastriot Lubishtani, le 13 septembre 2020
La prise de posi­tion interne du SEM rela­tive à la condam­na­tion de sa pratique par le Comité des Nations Unies contre la torture est un docu­ment offi­ciel dont l’accès ne peut être refusé au motif qu’il tombe­rait dans l’exception prévue par l’art. 7 al. 1 let. b LTrans.
Recommandation PFPDT du 2 avril 2020, X. c. Secrétariat d’État aux Migrations SEM


Un requé­rant d’asile érythréen débouté fait l’objet d’une déci­sion de renvoi vers son pays d’origine. Saisi d’une requête, le Comité des Nations Unies contre la torture conclut que le renvoi de l’intéressé consti­tue­rait une viola­tion de l’art. 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou trai­te­ments cruels, inhu­mains ou dégra­dants (CAT, C/​65/​D/​811/​2017).

Le 26 janvier 2020, un requé­rant dépose une demande d’accès au sens de l’art. 10 de la Loi sur la trans­pa­rence à l’adresse du Secrétariat d’État aux Migrations (SEM) portant notam­ment sur la prise de posi­tion interne de cette auto­rité concer­nant la déci­sion préci­tée. Le SEM n’y donne que partiel­le­ment suite le 21 février qui suit, en trans­met­tant certes le docu­ment inti­tulé « Eritrea : Stellungnahme betref­fend Eingaben im Zusammenhang mit dem CAT-Urteil C/​65/​0/​811/​2017 vom 7. Dezember 2018  », mais en caviar­dant cinq passages. 

Le Préposé fédé­ral à la protec­tion des données et à la trans­pa­rence (PFPDT) est saisi le 4 mars 2020 par le requé­rant d’une demande en média­tion (art. 13 LTrans) portant sur les passages caviar­dés. Intégralement écrite en raison des mesures sani­taires édic­tées par le Conseil fédé­ral en vue de contrer la pandé­mie de COVID-19, la procé­dure de média­tion abou­tit le 2 avril 2020 à une recom­man­da­tion du PFPDT (art. 14 LTrans).

L’art 6 al. 1 LTrans insti­tue le prin­cipe du droit d’accès aux docu­ments offi­ciels, auquel répondent les excep­tions prévues par l’art. 7 LTrans. Aux termes de l’art. 7 al. 1 let. b LTrans, « le droit d’accès est limité, différé ou refusé, lorsque l’accès à un docu­ment offi­ciel […] entrave l’exécution de mesures concrètes prises par une auto­rité confor­mé­ment à ses objec­tifs ». En l’occurrence, le SEM consi­dère que les passages liti­gieux « contiennent des décla­ra­tions sur les procé­dures internes de la procé­dure d’asile » et assi­mile leur publi­ca­tion au fait de four­nir « une sorte de guide de la procé­dure d’asile en Suisse » qui sape­rait le travail des auto­ri­tés juri­dic­tion­nelles en matière d’asile. C’est pour­quoi lesdits passages tombe­raient dans l’exception prévue par l’art. 7 al. 1 let. b LTrans selon le SEM. Le requé­rant ne sous­crit pas à une telle inter­pré­ta­tion, jugeant non-perti­nents les argu­ments invo­qués par l’autorité fédérale. 

Le PFPDT indique d’emblée qu’il s’impose de s’écarter de la lettre de l’art. 7 al. 1 let. b LTrans pour rendre justice à son véri­table esprit, en rete­nant une inter­pré­ta­tion restric­tive de la norme. À défaut en effet, une appli­ca­tion à la lettre permet­trait à l’administration de refu­ser l’accès à un grand nombre d’informations, ce qui éloi­gne­rait la LTrans du but qui lui a été assi­gné par le légis­la­teur. Ainsi, ce n’est que lorsque l’information divul­guée compro­met sérieu­se­ment une mesure concrète ou que le secret de cette dernière est « la clé de son succès » que l’accès à ladite infor­ma­tion peut être refusé (TAF, A‑683/​2016, c. 5.4.1).

De l’aveu même du SEM, les passages caviar­dés n’ont trait qu’à une méthode géné­rale de trai­te­ment des demandes d’asiles des requé­rants origi­naires d’Érythrée. Le PFPDT retient de ce fait qu’ils ne contiennent pas d’indications servant une « mesure concrète », si bien que de telles infor­ma­tions sont consti­tu­tives d’observations « d’ordre géné­ral ». Le fait que les requé­rants d’asile risquent de s’inspirer des infor­ma­tions caviar­dées plutôt que présen­ter objec­ti­ve­ment les motifs les ayant amenés à trou­ver refuge en Suisse ne saurait rien y changer. 

Il n’appert donc pas que la divul­ga­tion des passages caviar­dés entrave avec une forte proba­bi­lité l’exécution d’une quel­conque mesure concrète et que le main­tien du secret à leur égard est néces­saire au succès de la mesure. Il s’ensuit que la présomp­tion de liberté d’accès aux docu­ments offi­ciels au sens de l’art. 6 al. 1 LTrans n’a pas été renver­sée par l’autorité fédérale. 

Partant, le PFPDT conclut que le docu­ment requis doit être remis au requé­rant dans son inté­gra­lité. 

La présente affaire s’est arrê­tée à ce stade. En effet, le SEM a accepté cette recom­man­da­tion et trans­mis le docu­ment au requé­rant sans caviardage. 

Notons que l’art. 7 al. 1 let. b LTrans fait l’objet à juste titre selon nous d’une critique sévère de la part de la doctrine, laquelle souligne, d’une part, qu’il n’existe pas d’équivalent à l’étranger et dans les lois canto­nales sur la trans­pa­rence et, d’autre part, mais surtout, que la dispo­si­tion légale en ques­tion confère aux auto­ri­tés ni plus ni moins qu’un chèque en blanc (Blankocheck) (cf. Bertil Cottier, in : S. Brunner/​L. Mader (édit.), Stämpflis Handkommentar zum BGÖ, Berne 2008, Art. 7 N 24). Une inter­pré­ta­tion exclu­si­ve­ment litté­rale couvri­rait l’activité de l’État d’une certaine opacité qui est fonda­men­ta­le­ment étran­gère au but de trans­pa­rence devant guider l’application de la loi.



Proposition de citation : Kastriot Lubishtani, L’accès à la prise de position interne du SEM relative à une décision du Comité contre la torture, 13 septembre 2020 in www.swissprivacy.law/2


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