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Prélèvement de l’impôt ecclésiastique, prédication et baptême – protection des données

Martine Stoffel et Arnaud Biasin, le 16 octobre 2023
Une corpo­ra­tion ecclé­sias­tique a demandé l’accès aux données person­nelles du registre du contrôle des habi­tants pour les communes du canton de Fribourg. Le Tribunal canto­nal a analysé pour chaque donnée deman­dée, si son accès lui est néces­saire pour accom­plir ses tâches de prélè­ve­ment de l’impôt ecclé­sias­tique, de prédi­ca­tion et de baptême.

Arrêt du Tribunal canto­nal fribour­geois TC 601 2023 4 du 29 juin 2023 (cet arrêt fait l’objet d’un recours au Tribunal fédéral).

Nota bene : L’Autorité canto­nale de la trans­pa­rence, de la protec­tion des données et de la média­tion a rendu un préavis sur l’accès aux données deman­dées dans le cadre de l’affaire.

Accès aux données person­nelles du registre du contrôle des habi­tants – acti­vi­tés religieuses

Une corpo­ra­tion ecclé­sias­tique (la corpo­ra­tion) du canton de Fribourg béné­fi­ciant d’un statut de droit public a adressé une demande d’accès aux données person­nelles conte­nues dans le registre du contrôle des habi­tants (FriPers) du canton de Fribourg, et en parti­cu­lier à certaines données qui s’y trouvent (art. 12 al. 1 de la Loi canto­nale du 25 novembre 1994 sur la protec­tion des données [LPrD/​FR ; RSF 17.1] et art. 16 ss de la Loi canto­nale du 23 mai 1985 sur le contrôle des habi­tants [LCH ; RSF 114.21.1]). La LCH règle aux art. 16 ss l’accès à FriPers pour les auto­ri­tés et admi­nis­tra­tions publiques (art. 16a LCH) et les parti­cu­liers et orga­ni­sa­tions privées char­gés de l’exécution d’une tâche publique ou qui sont au béné­fice d’un mandat de pres­ta­tions et/​ou subven­tion­nés par l’Etat (art. 17a LCH).

Cette corpo­ra­tion est auto­nome par rapport à l’État et béné­fi­cie d’une souve­rai­neté fiscale. Elle a fait une demande d’accès à FriPers pour iden­ti­fier les membres de sa confes­sion, et accom­plir ses préro­ga­tives de droit public, à savoir préle­ver l’impôt ecclé­sias­tique, la prédi­ca­tion et le baptême.

La Direction de la sécu­rité, de la justice et du sport (DSJS) du canton de Fribourg a décidé d’octroyer l’accès aux données suivantes à la corpo­ra­tion : iden­ti­fiant commu­nal de la personne, nom offi­ciel, nom de céli­ba­taire, nom d’alliance, nom selon le passe­port étran­ger, prénoms offi­ciels, prénoms selon le passe­port étran­ger, date de nais­sance, sexe, date de décès, date d’arrivée, date de départ, adresse postale, adresse de domi­cile, appar­te­nance reli­gieuse, langue de corres­pon­dance pour les habi­tantes et les habi­tants de la confes­sion de la corpo­ra­tion. Elle a égale­ment précisé que l’ac­cès en ligne n’est pas auto­risé et qu’il appar­tient au service compé­tent de four­nir une extrac­tion de listes à l’in­té­res­sée. Ce ne sont pas toutes les données conte­nues dans FriPers qui ont été rendues acces­sibles, et pas non plus toutes celles qui ont été sollicitées.

Accès néces­saire pour accom­plir ses tâches

La corpo­ra­tion a fait valoir que son acti­vité requiert les données pour lesquelles l’accès lui a été dénié. Le Tribunal canto­nal a analysé, pour chaque donnée une par une, dans quelle mesure l’accès par FriPers est néces­saire pour que la corpo­ra­tion et ses paroisses puissent accom­plir leurs tâches.

Le Tribunal canto­nal a décidé que les données suivantes doivent être acces­sibles à la corpo­ra­tion, en plus de celles pour lesquelles l’accès avait été octroyé par la DSJS, pour les motifs évoqués ci-dessous :

  • État civil et date d’évènement de l’état civil : la corpo­ra­tion a besoin de ces données, dans la mesure où le mariage reli­gieux ne peut pas être célé­bré en l’absence de mariage civil préa­lable. L’accès à ces deux données doit donc lui être accordé.
  • Noms et prénoms actuels du père et de la mère (si même commune) : afin d’organiser des acti­vi­tés pour les enfants mineurs pour lesquelles la corpo­ra­tion est tenue d’obtenir le consen­te­ment des repré­sen­tants légaux, il lui est indis­pen­sable de connaître l’identité des parents.

Le Tribunal canto­nal a confirmé le refus de la DSJS d’octroyer l’accès aux données suivantes et pour les motifs évoqués ci-dessous :

  • Nom alias, autre nom, nom selon décla­ra­tion, prénom usuel, prénom selon décla­ra­tion : afin d’identifier les personnes de la confes­sion en ques­tion la corpo­ra­tion a unique­ment besoin du nom et prénom offi­ciel, du nom d’alliance et du nom de célibataire.
  • Lieu de nais­sance : le lieu de nais­sance n’est pas néces­saire à l’identification des personnes, puisqu’il est peu vrai­sem­blable que des personnes aient le même nom et la même date de naissance.
  • Nationalité : la commu­ni­ca­tion à adap­ter avec les parois­siens en fonc­tion de divers évène­ments avec des parois­siens d’autres cultures ou natio­na­li­tés, invo­quée par la corpo­ra­tion pour avoir accès à la natio­na­lité, ne fait pas partie de ses tâches. C’est pour cette raison que l’accès à la natio­na­lité doit lui être refusé.
  • Lieux d’origine : la corpo­ra­tion ayant déjà accès à l’état civil et à la date de l’évènement de l’état civil, les lieux d’origine ne sont pas néces­saires à la corpo­ra­tion afin de véri­fier si une personne dési­rant se marier ne l’est pas déjà, comme argumenté.
  • Commune d’annonce, rela­tion d’annonce et iden­ti­fi­ca­teur de bâti­ment EGID : l’accès n’est pas néces­saire, puisque la corpo­ra­tion dispose déjà du numéro attri­bué par l’Office fédé­ral de la statis­tique à la commune (art. 6 let. b de la loi fédé­rale du 23 juin 2006 sur l’harmonisation des registres des habi­tants et d’autres registres offi­ciels de personnes [LHR ; RS 431.02]). La corpo­ra­tion a d’ailleurs obtenu les adresses de domi­cile et postale.
  • Lieu de prove­nance et lieu de desti­na­tion, date de démé­na­ge­ment : afin d’attribuer la personne à une paroisse, il suffit d’obtenir la nouvelle adresse de domi­cile moyen­nant l’accès octroyé par la DSJS à FriPers. L’accès à ces données n’est donc pas nécessaire.
  • Catégorie de ménage : sur le plan admi­nis­tra­tif, l’obtention de cette donnée n’est pas pertinente.
  • Identificateur de loge­ment, numéro de ménage, nom du conjoint(e)/partenaire enre­gis­tré, prénom du conjoint(e)/partenaire enre­gis­tré, date de nais­sance du conjoint(e)/partenaire enre­gis­tré, sexe du conjoint(e)/partenaire enre­gis­tré : la corpo­ra­tion n’a pas besoin des infor­ma­tions sur le loge­ment pour effec­tuer ses tâches. L’accès aux données du conjoint(e) ou du parte­naire enre­gis­tré n’est pas non plus néces­saire, puisque l’accès doit se limi­ter aux personnes de confes­sion évan­gé­lique réformée.
  • Noms et prénoms du père et de la mère à la nais­sance de l’enfant : les noms et prénoms des parents à la nais­sance de l’enfant ne sont pas néces­saires, et cas échéant, ces données peuvent être solli­ci­tées direc­te­ment auprès des personnes concernées.
  • Nombre d’enfants mineurs : dans la mesure où les paroisses reçoivent les infor­ma­tions perti­nentes de la part des auto­ri­tés fiscales canto­nales et commu­nales, elles n’ont pas besoin d’ob­te­nir en sus la possi­bi­lité de connaître le nombre d’en­fants mineurs faisant ménage commun avec une personne réformée.
  • Numéro AVS (NAVS) : afin d’octroyer l’accès au NAVS à la corpo­ra­tion, il faudrait que le droit appli­cable auto­rise l’utilisation systé­ma­tique du NAVS par la corpo­ra­tion. Aucune dispo­si­tion de droit canto­nal, en parti­cu­lier ni la Loi canto­nale du 26 septembre 1990 concer­nant les rapports entre les Églises et l’État (LEE ; RSF 190.1), ni la loi sur le contrôle des habi­tants, n’au­to­rise expres­sé­ment la corpo­ra­tion à utili­ser le NAVS. S’il s’agissait d’une régle­men­ta­tion interne à la corpo­ra­tion et non d’une loi canto­nale au sens formel, la base légale ne serait pas suffi­sante. Faute de base légale (4 LPrD/​FR), l’accès ne peut pas être accordé.

Conclusion

Le Tribunal canto­nal a effec­tué un examen très poussé et détaillé, et ainsi rendu une déci­sion qui a donné une inter­pré­ta­tion stricte de la loi, ce qui se justi­fie sous l’angle de la propor­tion­na­lité. Cet arrêt a fait l’objet d’un recours, qui est pendant au Tribunal fédéral.



Proposition de citation : Martine Stoffel / Arnaud Biasin, Prélèvement de l’impôt ecclésiastique, prédication et baptême – protection des données, 16 octobre 2023 in www.swissprivacy.law/257


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