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Expressions pratiques du droit d’accès

Florence Henguely, le 23 novembre 2020
Nous mettons en ligne, de manière pério­dique, les contri­bu­tions d’au­teurs externes nous ayant fait l’hon­neur d’ac­cep­ter d’ac­com­pa­gner le lance­ment de Swissprivacy. Nous accueillons cette semaine la contri­bu­tion de Florence Henguely, Préposée canto­nale à la protec­tion des données pour le canton de Fribourg.

Introduction

L’ère digi­tale fait son chemin et la pratique juri­dique n’est pas en reste. Il est aujourd’hui diffi­cile, voire impos­sible, de parler de dossier procé­du­ral ou admi­nis­tra­tif sans faire réfé­rence d’une certaine manière à des données person­nelles. Néanmoins, toutes les données person­nelles ne sont pas forcé­ment soumises à la légis­la­tion sur la protec­tion des données (fédé­rale ou canto­nale). Un des critères d’exclusion est l’existence d’une procé­dure pendante. Le message concer­nant la révi­sion totale de la Loi fédé­rale sur la protec­tion des données ne donne plus comme critère essen­tiel l’existence d’une procé­dure pendante, mais l’existence d’un point de vue fonc­tion­nel d’un lien immé­diat avec une procé­dure devant un tribu­nal (FF 2017 6565, p. 6633). À noter que quand bien même il ne s’agirait pas d’un cas d’exclusion du champ d’application de la légis­la­tion et que celle-ci s’appliquerait, le droit d’accès ne saurait mettre un frein au respect des prin­cipes de procé­dure (notam­ment dans les cas de procé­dure admi­nis­tra­tive de première instance, soumise à la protec­tion des données). Cette préro­ga­tive ne saurait contour­ner les règles en matière d’établissement des faits et appré­cia­tion de la preuve (voir notam­ment l’arrêt du TF 1C_​224/​2014 du 25 septembre 2014, consid. 3.2 et réfé­rences citées).

Le droit d’accès est de nos jours une insti­tu­tion incon­tour­nable. Il offre la possi­bi­lité d’accéder à ses propres données person­nelles sous l’égide de la légis­la­tion sur la protec­tion des données, mais pas seule­ment. Le droit d’accès comprend notam­ment le droit d’accès aux docu­ments offi­ciels et le droit d’accès au dossier procé­du­ral. Le droit d’accès infor­ma­tion­nel garan­tit l’accès du public aux docu­ments offi­ciels de l’administration fédé­rale, canto­nale et commu­nale. Ce droit ne néces­site aucun inté­rêt parti­cu­lier au niveau fédé­ral et dans le canton de Fribourg. Il est dirigé par le prin­cipe « access to one, access to all » qui signi­fie que lorsque l’accès à un docu­ment offi­ciel est accordé à une personne, il doit l’être à toutes. La notion clé est celle de docu­ment offi­ciel ; i.e. toute infor­ma­tion enre­gis­trée sur quelque support que ce soit déte­nue par une auto­rité, qu’elle émane de celle-ci ou qu’elle lui ait été commu­ni­quée, dans l’accomplissement d’une tâche publique.

Lorsqu’il est fait réfé­rence à la possi­bi­lité de consul­ter un dossier, il est en prin­cipe renvoyé au droit d’être entendu (art. 29 al. 2 Cst.), dont un des pendants est « le droit de consul­ter le dossier de l’autorité ». Les juges de Mon-Repos ont eu l’occasion de préci­ser la notion de « dossier ». Ce dernier comprend tout élément suscep­tible de permettre à l’autorité de rendre sa déci­sion (voir notam­ment ATF 142 II 218, consid. 2.3 ; ATF 132 V 387, consid. 3.1). Quoique la formu­la­tion alle­mande soit quelque peu trom­peuse (« Entscheidrelevant », « entscheid­we­sent­lich »), comme le rappel Dubey, ce qui importe est qu’un élément soit perti­nent pour la cause, dès lors qu’il pour­rait plus tard se révé­ler déci­sif (cf. Jacques Dubey, Droits fonda­men­taux, volume II : Libertés, garan­ties de l’État de droit, droits sociaux et poli­tiques, Bâle 2017, n. 4063). La termi­no­lo­gie est ainsi très large. Ce nonobs­tant, le droit d’accès aux docu­ments offi­ciels ne comprend pas l’accès aux docu­ments offi­ciels concer­nant certaines procé­dures (art. 3 LTrans ; art. 21 LInf), pour lequel la légis­la­tion spéciale fait foi.

Pratique fribour­geoise

Dans un arrêt fribour­geois non publié du tribu­nal d’arrondissement, les diffé­rentes mani­fes­ta­tions du droit d’accès ont succes­si­ve­ment été examinées.

Dans le cadre d’une procé­dure pénale ouverte contre Y, X a été entendu en qualité de témoin. Après l’acquittement de Y par juge­ment du 4 juin 2020, X a demandé à consul­ter le dossier pénal. Le Juge de police a invité Y à se déter­mi­ner. Celui-ci s’y est opposé en invo­quant son inté­rêt privé, au vu d’un litige civil ouvert contre X, et a justi­fié son refus par les articles 27 LInf et 101 al. 3 CPP. En effet, l’article 101 al. 3 CPP permet la consul­ta­tion des dossiers liés à des procé­dures pendantes. Ce qui n’est pas le cas du dossier solli­cité. En présence d’une procé­dure pénale close, le trai­te­ment, la conser­va­tion des données et la procé­dure sont régis par les dispo­si­tions fédé­rales et canto­nales sur la protec­tion des données (art. 99 al. 1 CPP et art. 140 let. a LJ). Partant, le droit d’accès au dossier procé­du­ral, i.e. le droit d’être entendu, ne peut être invo­qué (dans ce sens TC/​FR 502 2020 154 du 12 octobre 2020). Par ailleurs, quoiqu’il s’agisse d’un docu­ment offi­ciel confor­mé­ment à l’article 22 LInf, la procé­dure préli­mi­naire prévue par le CPP n’étant pas publique (art. 69 al. 3 let. a CPP), la LInf exclut du droit d’accès infor­ma­tion­nel les procès-verbaux d’instruction (art. 29 al. 1 let. b LInf).

À défaut de droit d’accès au dossier procé­du­ral ou dans ce cas précis à un docu­ment offi­ciel, la voie du droit d’accès à ses propres données demeure envi­sa­geable. La termi­no­lo­gie parle d’elle-même, des données person­nelles doivent être en cause, notam­ment lorsque l’information soule­vée traite d’une personne iden­ti­fiée ou iden­ti­fiable. Concernant cette dernière notion, il s’agit du cas où des données permettent indi­rec­te­ment, par corré­la­tion d’informations ou en raison du contexte, de déter­mi­ner à qui elles se rapportent. Une possi­bi­lité d’identification pure­ment théo­rique ne suffit pas. Si l’identification néces­site des moyens tels que, selon le cours ordi­naire des choses, aucun inté­ressé ne les mettra en œuvre, la personne concer­née n’est pas iden­ti­fiable au sens de la légis­la­tion. Par ailleurs, « un procès-verbal de séance contient des infor­ma­tions rela­tives aux personnes qui se sont expri­mées durant la séance, mais égale­ment des données person­nelles rela­tives aux personnes au sujet desquelles des affir­ma­tions ont été faites ». Bien que le droit d’accès d’une personne à ses données person­nelles ne demande pas de faire valoir un quel­conque inté­rêt, il peut toute­fois être refusé, restreint, voire différé, si un inté­rêt public prépon­dé­rant l’exige, ou en présence d’un inté­rêt digne de protec­tion d’un tiers.

Le dossier procé­du­ral contient certes les données person­nelles de X, mais égale­ment de Y. Celui-là a un inté­rêt vrai­sem­blable à la consul­ta­tion dès lors que Y fait valoir des préten­tions civiles à l’appui de son acquit­te­ment pénal. X a ainsi le droit de connaître la moti­va­tion pour se déter­mi­ner et se défendre effi­ca­ce­ment. À la lumière du prin­cipe de la propor­tion­na­lité, la consul­ta­tion restreinte a été admise notam­ment pour les infor­ma­tions déjà connues par X, à l’exclusion des passages rela­tifs à la situa­tion person­nelle, finan­cière et fami­liale actuelle de Y.



Proposition de citation : Florence Henguely, Expressions pratiques du droit d’accès, 23 novembre 2020 in www.swissprivacy.law/32


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