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Une SA investie d’une tâche publique : assujettissement à la LInfo ?

Lisa Dubath, le 31 octobre 2025
Un centre spor­tif inter­com­mu­nal, consti­tué en la forme d’une SA peut être consi­déré comme un orga­nisme investi d’une tâche publique et se trou­ver ainsi soumis à Loi sur l’information vaudoise.

Décision de la Cour de droit admi­nis­tra­tif et public du Tribunal canto­nal, GE.2020.0076 du 2 novembre 2021

Faits

Le 12 mai 2020, une jour­na­liste demande au syndic de la commune de Prilly le rapport d’au­dit qu’une société tierce a établi en mai 2020 au sujet d’un centre spor­tif inter­com­mu­nal. Le syndic, égale­ment membre du conseil d’ad­mi­nis­tra­tion d’un centre spor­tif inter­com­mu­nal (ci-après « la Société »), refuse de le commu­ni­quer pour des motifs de protec­tion des données personnelles.

En réac­tion à cela, la jour­na­liste et la société pour laquelle elle travaille recourent contre la déci­sion du 12 mai 2020 rendue par la commune de Prilly devant la Cour de droit admi­nis­tra­tif et public du Tribunal canto­nal (CDAP). Les recou­rantes deman­dant l’ac­cès au rapport d’au­dit précité.

Le 11 juin 2020, la CDAP accuse récep­tion du recours et requiert notam­ment des parties de se déter­mi­ner si le cour­riel du 12 mai 2020 contre lequel le recours est dirigé consti­tue une déci­sion. La muni­ci­pa­lité de Prilly se consi­dère incom­pé­tente dans le litige au motif et déclare n’avoir rendu aucune déci­sion en la matière. Le syndic affirme ne pas être soumis à la Loi vaudoise sur l’in­for­ma­tion (LInfo ; BLV 170.21), que partant, il n’a nulle­ment rendu de déci­sion et conteste la déci­sion de rendre le rapport public. Les recou­rantes main­tiennent quant à elles leur posi­tion, arguant que le cour­riel de refus du syndic du 12 mai 2020 consti­tue une déci­sion claire et qu’il y a égale­ment un inté­rêt public d’ac­cé­der à ce rapport.

Une société anonyme (SA), – soit un orga­nisme privé -, peut-elle être soumise à la LInfo ?

Deux ques­tions liti­gieuses se posent dans le cas d’espèce. La première est de savoir si une société anonyme peut être consi­dé­rée comme auto­rité soumise à la LInfo. En d’autres termes, il s’agit de se deman­der si un centre spor­tif inter­com­mu­nal est investi d’une tâche publique, en vertu de laquelle il serait soumis à la LInfo. La deuxième inter­ro­ga­tion concerne l’éventuelle obli­ga­tion de la Municipalité de rendre une déci­sion et, cas échéant, ce qu’il advient en cas de refus de statuer.

À titre limi­naire, la CDAP rappelle que le champ d’application de la LInfo depuis le 1er janvier 2014 s’étend aux personnes physiques et morales privées auxquelles l’Etat a confié des tâches publiques (art. 2 let. f LInfo). Contrairement à l’ancienne LInfo, la liste de l’art. 3 du Règlement d’application de la LInfo (RLInfo ; BLV 170.21.1) n’est désor­mais plus rele­vante pour défi­nir les orga­nismes inves­tis d’une tâche publique. Il n’est donc pas d’entrée de jeu exclu qu’une société anonyme se voie appli­quer la LInfo.

La média­tion est tentée mais n’aboutit pas. À la suite de cela, le juge instruc­teur de la CDAP se penche sur l’historique de la Société pour déter­mi­ner si le centre inter­com­mu­nal avait à l’époque été chargé de tâches publiques que la Société a par la suite reprises à son compte.

Une tâche publique a‑t-elle été confiée à la Société sur la base du droit cantonal ? 

Définition de la tâche publique

Premièrement, une tâche publique est celle qui devrait en prin­cipe être confiée à l’État, mais qui peut être délé­guée à une entité privée. Ainsi trois condi­tions doivent être réunies pour rete­nir une tâche étatique : l’exercice d’une acti­vité durable en prin­cipe par l’État, une base légale (soit un inté­rêt public quali­fié) et enfin une obli­ga­tion d’exécution par l’entité délégataire.

Délégation d’une telle tâche à un privé et soumis­sion du délé­ga­taire au prin­cipe de transparence

Le fait que la Société soit consti­tuée en la forme d’une SA soulève le point de la colla­bo­ra­tion du secteur public avec le secteur privé. En outre, la LInfo vise tant les enti­tés publiques décen­tra­li­sées que les orga­nismes privés délé­ga­taires lorsqu’elle mentionne les personnes morales auxquelles le canton ou une commune confie des tâches publiques.

La LInfo s’ap­plique aux orga­nismes délé­ga­taires de tâches publiques, dans l’exécution de ces tâches, même si ceux-ci sont dépour­vus du pouvoir d’adopter des règles de droit ou des décisions

Comme le précise la CDAP, le légis­la­teur fédé­ral prévoit l’assujettissement à la LTrans aux seules enti­tés privées qui édictent des actes ou rendent en première instance des déci­sions au sens du droit admi­nis­tra­tif. Le choix des légis­la­teurs canto­naux, à propos de l’assujettissement des personnes morales et autres insti­tu­tions de droit public et de droit privé, est plus large. La juris­pru­dence vaudoise a par ailleurs confirmé, par une inter­pré­ta­tion litté­rale de la LInfo, que celle-ci s’appliquait aux orga­nismes publics et privés délé­ga­taires de tâches publiques, dans l’exécution de ces tâches (arrêt GE.2018.0002 du 7 juin 2018, Tridel SA).

Distinction entre simple soutien d’une acti­vité privée par l’État et délé­ga­tion de tâches publiques

Au demeu­rant, la CDAP distingue le simple soutien d’une acti­vité privée par l’État de la délé­ga­tion de tâches publiques en consi­dé­rant que l’indemnité octroyée signi­fie une tâche délé­guée. À l’inverse, l’aide finan­cière s’apparente à un simple soutien d’une acti­vité privée. L’existence d’une parti­ci­pa­tion de l’État ne consti­tue pas en soi un critère défi­nis­sant une tâche déléguée.

Les acti­vi­tés de la Société, sont-elles des tâches publiques cantonales ?

In casu, selon la CDAP, malgré l’intérêt public certain à l’activité de la Société – soit l’exploitation d’un centre spor­tif – laquelle contri­bue à la réali­sa­tion d’une tâche publique (« encou­ra­ger l’édu­ca­tion physique et spor­tive et la pratique du sport à tous les niveaux et pour l’en­semble de la popu­la­tion », art. 1 al. 1 de la loi vaudoise sur l’édu­ca­tion physique et le sport du 18 décembre 2012 (LEPS ; BLV 415.01)), son acti­vité spéci­fique ne découle ni direc­te­ment de la LEPS, ni n’est impo­sée par la loi. Par consé­quent, même si l’intervention du canton prend la forme d’un soutien, ce n’est pas suffi­sant pour admettre que le centre spor­tif s’est vu confier l’exécution d’une tâche publique cantonale.

Les acti­vi­tés de la Société, sont-elles alors des tâches publiques communales ?

En revanche, la CDAP estime qu’au regard des conven­tions signées par les communes et les comptes commu­naux, la Société déploie des acti­vi­tés rele­vant de tâches publiques commu­nales. En effet, les trois communes prin­ci­pales action­naires ont créé une personne morale avec l’objectif exprès d’exécuter leurs obli­ga­tions de droit public (art. 3a et 107a de la loi vaudoise du 28 février 1956 sur les communes (LC ; BLV 175.11). L’exigence de base légale étant allé­gée au niveau commu­nal, l’art. 2 LC semble suffi­sant. Il s’ensuit que la Société doit être consi­dé­rée comme char­gée de tâches publiques et par ce biais qu’elle est assu­jet­tie à la LInfo (art. 2 al. 1 let. f LInfo).

L’audit effec­tué par un manda­taire externe quant au fonc­tion­ne­ment du centre, est-il un docu­ment soumis à la LInfo ?

Les docu­ments soumis à la LInfo doivent remplir les condi­tions suivantes : être ache­vés, déte­nus par une auto­rité soumise à la LInfo, liés à l’accomplissement d’une tâche publique et fina­le­ment ne pas être desti­nés à un usage person­nel (art. 9 al. 1 LInfo, pour de plus amples préci­sions quant à la notion de « docu­ments offi­ciels » dans la LInfo, voir https://​swiss​pri​vacy​.law/7/). En d’autres termes, les docu­ments offi­ciels sont concer­nés car ils ont un rapport avec une action admi­nis­tra­tive des auto­ri­tés. Après avoir examiné la juris­pru­dence à ce sujet, la CDAP consi­dère que le rapport d’audit liti­gieux remplit les exigences cumu­la­tives de l’art. 9 al. 1 LInfo et peut ainsi être quali­fié de docu­ment offi­ciel, soumis à la LInfo.

Le rapport d’audit est-il détenu par une autorité ?

Au vu de la situa­tion parti­cu­lière du vice-président de la Société qui est égale­ment syndic d’une commune, un point déli­cat est de savoir si le rapport d’audit est détenu par une auto­rité. Malgré les droits d’information de l’entité délé­gante envers son repré­sen­tant, la trans­mis­sion de l’organe du repré­sen­tant à la collec­ti­vité délé­gante n’est en revanche pas auto­ma­tique. Au surplus, le fait que le syndic de la commune de Prilly ait signé le cour­riel en ques­tion avec cette casquette ne suffit pas pour rete­nir que la commune est en posses­sion du docu­ment. Partant, la CDAP rejette le recours dirigé contre la muni­ci­pa­lité car en défi­ni­tive, l’autorité soumise à la LInfo n’a pas à remettre un docu­ment qui n’est pas en sa possession.

Conclusion

Finalement, la Société étant une entité soumise à la LInfo, le recours est partiel­le­ment retenu contre elle. La Société se voit donc tenue de rendre une déci­sion, en bonne et due forme, après avoir mené une procé­dure admi­nis­tra­tive non conten­tieuse. Pour le surplus, le recours contre la muni­ci­pa­lité, quant à lui, est rejeté.

Cette déci­sion de la CDAP confirme la manière dont on peut iden­ti­fier si une entité exerce une tâche publique ou non. La ques­tion de socié­tés privées exer­çant des tâches publiques est un point reve­nant régu­liè­re­ment en pratique et dont la réponse n’est pas aisée. Cette déci­sion est par consé­quent inté­res­sante puisqu’elle donne des éléments de réponse sur les éléments à prendre en compte dans cette qualification.



Proposition de citation : Lisa Dubath, Une SA investie d’une tâche publique : assujettissement à la LInfo ?, 31 octobre 2025 in www.swissprivacy.law/380


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