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Droit du justiciable de demander la rectification de ses données personnelles

Joséphine Boillat et Stéphane Werly, le 21 décembre 2020
Dans un arrêt du 1er septembre 2020 (ATA/​831/​2020) rela­tif à une affaire gene­voise, la Chambre admi­nis­tra­tive de la Cour de justice a jugé que le droit d’ac­cès au juge garanti par l’art. 29a Cst. permet à un justi­ciable de deman­der la recti­fi­ca­tion de données person­nelles le concer­nant au sens de l’art. 47 LIPAD, indé­pen­dam­ment de l’au­to­rité en cause.

Arrêt de la Chambre admi­nis­tra­tive de la Cour de justice du canton de Genève, ATA/​831/​2020 du 1er septembre 2020.

Demande d’accès, média­tion et recommandation

La présente affaire est consé­cu­tive à un rapport de la Cour des comptes rela­tif à un audit de gestion et de léga­lité portant sur la poli­tique et la gestion des ressources humaines d’une commune gene­voise. A., B. et C., alors conseillers admi­nis­tra­tifs de ladite commune, avaient solli­cité, par le biais de leur avocat, la copie du procès-verbal d’au­di­tion de la société en charge d’une hotline en faveur de son person­nel. La demande avait été dépo­sée tant sous l’angle de la trans­pa­rence (accès au docu­ment), ce qui ouvrait la voie à une média­tion, que sous l’angle de la protec­tion des données person­nelles (cessa­tion d’un trai­te­ment préten­du­ment illi­cite de données concer­nant les requé­rants au sens de l’art. 47 LIPAD).

La média­tion ayant échoué, la Préposée adjointe s’est atte­lée à la rédac­tion d’une recom­man­da­tion. Toutefois, elle n’a pas été en mesure de se pronon­cer, ni s’agis­sant de la demande d’ac­cès, ni sur les préten­tions liées à la protec­tion des données person­nelles, car la Cour des comptes ne lui a pas donné accès au docu­ment querellé. L’entité lui oppo­sait le fait qu’elle n’est pas mention­née expres­sé­ment à l’art. 3 LIPAD (champ d’application). Il est vrai que l’ex­posé des motifs rela­tifs à la LIPAD n’évoque pas cette ques­tion, la loi ayant été adop­tée avant la créa­tion de cette insti­tu­tion. De plus, la révi­sion de la LIPAD en 2008, entrée en vigueur le 1er janvier 2010 (ajout du volet concer­nant la protec­tion des données person­nelles) n’a pas non plus été l’oc­ca­sion de trai­ter de ce point parti­cu­lier durant les travaux prépa­ra­toires. Seules deux dispo­si­tions mentionnent la Cour des comptes : l’art. 41 al. 2 LIPAD réserve ses compé­tences et règles de fonc­tion­ne­ment s’agis­sant du trai­te­ment des données person­nelles à des fins géné­rales de statis­tique, de recherche scien­ti­fique, de plani­fi­ca­tion ou d’éva­lua­tion de poli­tiques publiques ; l’art. 53A al. 1 let. b LIPAD indique en outre que la qualité de Préposé canto­nal ou de Préposée adjointe est incom­pa­tible avec celle de magis­trat de la Cour des comptes.

A., B. et C. ont ensuite saisi la Chambre admi­nis­tra­tive de la Cour de justice d’un recours pour déni de justice, concluant à ce que celui-ci soit constaté, à ce qu’il soit ordonné à la Cour des comptes de rendre une déci­sion formelle dans le cadre de la procé­dure LIPAD visant d’une part l’ac­cès aux échanges avec la société en charge de la hotline et à son procès-verbal d’au­di­tion et, d’autre part, la cessa­tion du trai­te­ment illi­cite des données les concer­nant, ainsi qu’à l’oc­troi d’une indem­nité de procédure.

Arrêt de la Chambre admi­nis­tra­tive de la Cour de justice : déni de justice

Après avoir défini ce qu’il fallait consi­dé­rer comme « déci­sions » au sens de l’art. 4 al. 1 LPA, la Chambre admi­nis­tra­tive s’est attar­dée sur l’art. 29a Cst., selon lequel toute personne a droit à ce que sa cause soit jugée par une auto­rité judi­ciaire. Elle a rappelé que, pour notre Haute Cour, la procé­dure offerte par la LIPAD, fondée sur l’art. 47, permet de satis­faire à l’exi­gence de cette norme (TF 1C_​471/​2012 du 23 mai 2013, cons. 4.3). Les juges gene­vois ont estimé à cet égard que le droit d’ac­cès au juge permet à un justi­ciable de deman­der la recti­fi­ca­tion de données le concer­nant au sens de l’art. 47 LIPAD, indé­pen­dam­ment de l’au­to­rité en cause. En consé­quence, bien que la Cour des comptes ne soit en prin­cipe pas une auto­rité déci­sion­naire ni ne soit mention­née dans la liste exhaus­tive des art. 5 et 6 LPA, elle doit statuer en appli­ca­tion de la LIPAD.

Enfin, les juges ont consi­déré que si la ques­tion d’un inté­rêt digne de protec­tion pouvait souf­frir de rester indé­cise s’agis­sant de la commune, cette condi­tion était réali­sée pour les personnes physiques recou­rantes ayant parti­cipé à la procé­dure non conten­tieuse qui, même si elles ne sont pas nommées par le rapport, sont aisé­ment iden­ti­fiables par ce dernier au regard de leur fonc­tion. Dans ce cadre, A., B. et C. n’ont pas besoin de faire valoir un besoin d’in­for­ma­tion supplé­men­taire en lien avec le premier but de la LIPAD (art. 1 al. 2 let. a LIPAD). Le recours pour déni de justice a donc été admis s’agis­sant de la recti­fi­ca­tion des données au sens de l’art. 47 LIPAD et le dossier renvoyé à la Cour des comptes pour qu’elle rende une déci­sion dans ce sens.

Soumission de la Cour des comptes à la LIPAD ?

S’agissant de la LIPAD, la Chambre admi­nis­tra­tive a évoqué les deux volets de la loi, soit l’in­for­ma­tion rela­tive aux acti­vi­tés des insti­tu­tions et la protec­tion des données person­nelles (art. 1 al. 1 LIPAD). En matière de trans­pa­rence, toute personne, physique ou morale, peut avoir accès aux docu­ments en posses­sion des insti­tu­tions publiques, sauf excep­tion prévue ou réser­vée par cette loi (art. 24 al. 1 LIPAD) ; par docu­ments, il faut entendre tous les supports d’in­for­ma­tions déte­nus par une insti­tu­tion conte­nant des rensei­gne­ments rela­tifs à l’ac­com­plis­se­ment d’une tâche publique (art. 25 al. 1 LIPAD). Parallèlement à ce droit d’ac­cès géné­ral, le titre III de la loi (art. 35–49 LIPAD) a trait à la protec­tion des données person­nelles, les art. 35 à 43 LIPAD concer­nant le trai­te­ment, la commu­ni­ca­tion et la destruc­tion des données par les insti­tu­tions publiques, tandis que les art. 44 à 47 LIPAD précisent les droits de la personne concernée.

Il est inté­res­sant de rele­ver que les juges ne se sont pas aven­tu­rés sur la déli­cate ques­tion de la soumis­sion contes­tée de la Cour des comptes à la LIPAD. Certes, des indices penchent en faveur de l’inclusion de cette entité dans le champ d’application de la loi (décla­ra­tion de fichiers au cata­logue, présence à la séance de média­tion, acces­si­bi­lité de la LIPAD sur le site Internet de l’entité). Cela étant, à notre sens, seule une mention expli­cite de la Cour des comptes dans l’art. 3 LIPAD permet­trait de combler ce qu’il convient de consi­dé­rer comme une lacune du texte légal. La prochaine révi­sion de la LIPAD, rendue néces­saire par les divers chan­ge­ments inter­ve­nus au niveau fédé­ral et inter­na­tio­nal, devra assu­ré­ment permettre de régler ce point.



Proposition de citation : Joséphine Boillat / Stéphane Werly, Droit du justiciable de demander la rectification de ses données personnelles, 21 décembre 2020 in www.swissprivacy.law/44


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