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Les procès-verbaux des séances des Municipalités vaudoises sont-ils publics ?

Kastriot Lubishtani et Livio di Tria, le 30 mars 2023
L’art. 64 al. 2 de la Loi vaudoise sur les communes insti­tue le secret des débats des Municipalités et inter­dit la commu­ni­ca­tion des procès-verbaux de ses séances à des tiers. Cette excep­tion ne concerne néan­moins que les comptes rendus des séances des Municipalités, soit la trans­crip­tion des débats, sans porter sur les déci­sions des Municipalités conte­nues dans les procès-verbaux, lesquelles restent soumises à la Loi vaudoise sur l’information.

Dans un arrêt du 11 novembre 2022, la Cour de droit admi­nis­tra­tif et public (CDAP) du Tribunal canto­nal vaudois a consi­déré que la liste des sujets trai­tés lors d’une séance d’un exécu­tif commu­nal consti­tuent des « infor­ma­tions » acces­sibles en vertu du prin­cipe de trans­pa­rence (cf. www​.swiss​pri​vacy​.law/​194). Cela étant, les juges canto­naux ont débordé le cadre du litige pour discu­ter le champ d’application de la Loi vaudoise sur l’information (LInfo ; BLV 170.21) en rela­tion aux extraits des procès-verbaux d’une Municipalité, lesquels ne faisaient pas l’objet de la demande d’accès en cause. En effet, la CDAP écrit tout d’abord que :

« S’agissant des extraits de procès-verbaux, ils sont en prin­cipe exclus du champ d’application de la LInfo, non pas en raison de leur qualité de docu­ment interne, mais en vertu de l’art. 64 al. 2 de la Loi vaudoise sur les communes (LC ; BLV 175.11) […] qui consti­tue ainsi une lex specia­lis au sens de l’art. 15 LInfo ».

Pour comprendre pour­quoi et en quoi cette affir­ma­tion est discu­table, il est néces­saire de reve­nir sur les termes de l’art. 64 al. 2 LC. La première phrase de cette dispo­si­tion insti­tue le secret des débats des Municipalités. Quant à la seconde, elle inter­dit la commu­ni­ca­tion des procès-verbaux des séances des Municipalités à des tiers sauf en cas de demande de l’autorité de surveillance ou d’une auto­rité judi­ciaire. Cette dernière a été ajou­tée a poste­riori par le légis­la­teur vaudois lors d’une révi­sion de la LC entrée en vigueur en 2013.

La ratio legis de cette modi­fi­ca­tion était de résoudre une contro­verse exis­tant depuis de nombreuses années au sujet carac­tère confi­den­tiel ou non des procès-verbaux des Municipalités. Le service canto­nal en charge des rela­tions avec les communes consi­dé­rait à cet égard que les procès-verbaux ne pouvaient pas être commu­ni­qués à des tiers dès lors que les séances des Municipalités n’étaient pas publiques, raison­ne­ment qui prêtait le flanc à la critique selon le Conseil d’État vaudois (Exposé des motifs et projets de lois modi­fiant la LC, p. 14). Dans la mesure où l’objet du secret de l’art. 64 al. 2 1ère phr. LC se rapporte aux « séances » et « discus­sions », il est admis selon Bocquet que les procès-verbaux ne sont pas exclus du prin­cipe de trans­pa­rence. Il est en effet néces­saire de distin­guer selon le contenu même des procès-verbaux qui peuvent être résu­més en trois catégories :

  • les procès-verbaux décisionnels ;
  • les déci­sions d’une Municipalité ;
  • les procès-verbaux de débat.

Premièrement, les procès-verbaux déci­sion­nels contiennent les déci­sions ou les prises de posi­tion d’une Municipalité en fonc­tion des objets portés à l’ordre du jour d’une séance donnée. Ces docu­ments sont ainsi soumis à la LInfo et l’accès à ces derniers devrait en prin­cipe être octroyé, sous réserve de l’existence d’un inté­rêt privé ou public prépon­dé­rant limi­tant ou excluant la trans­mis­sion confor­mé­ment à l’art. 16 LInfo. Les déci­sions d’une Municipalité peuvent être assi­mi­lées à cette première caté­go­rie de documents.

Deuxièmement, les procès-verbaux de débats sont des comptes-rendus de séance rédi­gés par les Municipalités ou, autre­ment dit, la trans­crip­tion des débats qui ont précédé la prise des déci­sions préci­tées. Selon le Conseil d’État vaudois, les procès-verbaux de débats sont exclus du prin­cipe de trans­pa­rence, car ils ne concernent pas à propre­ment parler la gestion de la Commune et contiennent le plus souvent des opinions person­nelles des Municipaux qui n’ont pas à être connues, notam­ment compte tenu du prin­cipe de la collé­gia­lité et des éléments touchant à des inté­rêts privés liés au secret (Exposé des motifs et projets de lois modi­fiant la LC, p. 15).

La distinc­tion est somme toute théo­rique dans la mesure où un procès-verbal d’une Municipalité fait état des sujets trai­tés, des débats en rela­tion à ces derniers et des déci­sions qui sont le résul­tat des discus­sions des Municipaux. Dès lors, de quelle manière le prin­cipe de la trans­pa­rence doit-il s’exprimer ?

Selon l’arrêt du 11 novembre 2022, les sujets trai­tés lors des séances des Municipalités sont des « infor­ma­tions » acces­sibles selon la LInfo qui doivent être commu­ni­qués soit par l’intermédiaire de l’accès aux ordres du jour soit par l’établissement d’une liste ad hoc. Il en va de même des déci­sions ou prises de posi­tion d’une Municipalité qui sont égale­ment des « infor­ma­tions ». Cela étant, se pose la ques­tion suivante et que la CDAP décide de lais­ser ouverte :

« On pour­rait toute­fois se deman­der si une version dûment caviar­dée d’un extrait de procès-verbal, suppri­mant toutes les réfé­rences aux échanges de fond inter­ve­nus entre les membres de la Municipalité, et se limi­tant à la seule mention des sujets discu­tés et des déci­sions prises – on parle en géné­ral dans un tel cas de procès-verbal déci­sion­nel – pour­rait échap­per au prin­cipe de transparence ».

Lorsqu’elle évoque « un extrait de procès-verbal », la CDAP semble en réalité faire réfé­rence aux procès-verbaux déci­sion­nel et de débat, plutôt qu’u­ni­que­ment le premier, sans pour autant distin­guer les deux alors que le régime qu’ils suivent est diffé­rent. En effet et comme nous venons de le voir, un procès-verbal déci­sion­nel (ainsi que les déci­sions d’une Municipalité) est soumis à la trans­pa­rence, alors qu’un procès-verbal de débat ne l’est pas.

S’agissant enfin d’un procès-verbal de débat et dans l’hypothèse envi­sa­gée par la CDAP, le caviar­dage du procès-verbal permet assu­ré­ment de mettre en œuvre le secret de l’art. 64 al. 2 1ère phr. LC. L’accès sous cette forme à ce docu­ment ne permet pas d’obtenir des infor­ma­tions qui ne sont pas publiques et le but visé par art. 64 al. 2 1ère phr. LC est donc atteint. C’est pour­quoi, sous réserve de l’art. 16 LInfo, rien ne s’opposerait à l’accès à un procès-verbal de débat caviardé.



Proposition de citation : Kastriot Lubishtani / Livio di Tria, Les procès-verbaux des séances des Municipalités vaudoises sont-ils publics ?, 30 mars 2023 in www.swissprivacy.law/212


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